L’apparition d’une personne dans un fichier de police et de gendarmerie peut avoir des répercussions professionnelles désastreuses si l’on n’y prend garde. Deux exemples récents l’ont démontrés.
Dans le premier, le Tribunal administratif de Toulon annule une décision du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) qui a eu irrégulièrement accès aux données du Système de traitement des infractions constatées (Stic) pour refuser à un candidat le droit d’effectuer un stage en vue de devenir agent de sécurité privée (TA Toulon n° 1300806).
Le législateur a prévu que seuls des agents spécialement habilités et désignés nommément par le Préfet peuvent consulter les fichiers traités par les services de police et de gendarmerie comme le fichier STIC. A défaut, l’accès est interdit.
Depuis 2013, les fichiers Stic et Judex sont fusionnés au profit du fichier Taj (traitement des antécédents judiciaires). Au total, près de 9 millions de citoyens étaient répertoriés dans des fichiers, 6,8 milliers de fiches étaient répertoriées par le Stic et les 2,6 millions de profils par le Judex. Le Stic, tout comme le Judex recensaient nom et prénom, date et lieu de naissance, nationalité et adresse des individus. Le hic ? Seuls 5 à 10% des classements sans suite étaient transmis, et donc indiqués dans les fichiers.
La motivation retenue par le Tribunal administratif est la suivante :
« qu’alors même qu’il est constant que ce fichier a effectivement été consulté, le Conseil national des activités privées de sécurité n’a pas répondu à ce moyen soulevé dans le mémoire en réplique enregistré le XX malgré la réouverture de l’instruction prononcée à cet effet le XX et ne justifie pas dès lors de l’habilitation spéciale dont auraient disposé les agents ayant consulté les données concernant M. B qui étaient contenues dans le fichier « Stic » et sur la base desquelles la décision de refus a été prise ; que dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l’administration a eu irrégulièrement accès aux données du fichier STIC et ne pouvait dès lors se fonder sur ces informations pour prendre sa décision doit être accueilli ; que M. B est fondé, pour ce motif, à obtenir l’annulation de la décision litigieuse. »
Quelques mois avant cette décision, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a condamné le fichier Stic comme attentatoire aux Libertés et Droits fondamentaux contenus dans les dispositions de l’article 8 de la convention de sauvegarde (CEDH 18 septembre 2014, n° 21010/10) : « Le régime de conservation des fiches dans le Stic, tel qu’il a été appliqué à M. Brunet, ne traduit pas un juste équilibre entre les intérêts publics et privés concurrents en jeu »,
Dans cette seconde affaire, comme il arrive très souvent, l’homme est inscrit au fichier Stic alors qu’aucune poursuite et donc mutatis mutandis, aucune condamnation ne pesait sur lui.
Le requérant a une altercation violente avec sa compagne, qui décide de porter plainte auprès du procureur de la République. L’homme, placé en garde à vue, porte plainte à son tour contre sa compagne pour violences. Il est ensuite libéré et convoqué pour médiation pénale. Mais le le couple écrit au procureur pour contester les termes de la convocation de la médiation pénale, soit « avoir (…) volontairement exercé des violences… ». La médiation va tout de même à son terme et la procédure est classée sans suite.
Néanmoins, l’homme était inscrit au fichier Stic.
Dans l’affaire jugée au Tribunal administratif il n’y avait pas eu d’enquête préliminaire de « procédure » d’ouverte, on se situait encore en amont d’une possibilité de classement sans suite mais cela n’a pas empêché une inscription au Stic.
Toutefois, l’article 3 du Décret n° 2001-583 du 5 juillet 2001 précise bien que « toute personne ayant bénéficié d’une mesure de classement sans suite pour insuffisance de charges, d’une décision de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement devenue définitive peut demander que le fichier soit mis à jour par le responsable du traitement ».
Dans la mesure où une telle apparition dans un fichier peut avoir des répercussions professionnelles désastreuses, il est vivement conseillé de faire application de la procédure d’effacement dès lors que les conditions sont réunies.