Quelle doit être la réaction des administrations publiques lorsqu’elles découvrent qu’un de leurs agents contractuels a fait l’objet d’une condamnation pénale ?
C’est à cette question qu’a répondu le 2 février 2015 le Conseil d’Etat dans un arrêt n° 367724.
Les faits sont assez simples : un agent d’entretien a été recruté en 2002 par le centre hospitalier de Hyères dans le cadre d’un contrat aidé puis il a bénéficié à compter du 1er novembre 2007 de contrats à durée déterminée successifs puis, à compter du 1er janvier 2010, d’un contrat à durée indéterminée. Satisfait du travail accompli, l’Hôpital envisage de le titulariser comme agents des services hospitaliers.
Or, aux termes de l’article 3 du décret du 6 février 1991 : « Aucun agent contractuel ne peut être recruté si, étant de nationalité française : (…) 2° Les mentions portées au bulletin n° 2 de son casier judiciaire sont incompatibles avec l’exercice des fonctions ».
Et là, c’est le drame… L’agent d’entretien a été condamné par un jugement du tribunal correctionnel de Toulon du 24 janvier 2008 à une peine de trente mois d’emprisonnement avec sursis pour complicité de trafic de stupéfiants, condamnation qui apparait au B2.
Le Directeur du centre hospitalier a décidé d’interrompre la procédure de titularisation ET de licencier l’agent au double motif que les mentions portées au bulletin n° 2 de son casier judiciaire n’étaient pas compatibles avec l’exercice de ses fonctions et, d’autre part, qu’il avait commis une faute disciplinaire de nature à justifier la sanction du licenciement sans préavis ni indemnité en se rendant coupable de l’infraction et en cachant sa condamnation à l’Hôpital.
L’agent a saisi le Tribunal adminsitratif de Toulon qui lui a donné raison. L’Hôpital a fait appel, la Cour administrative d’appel de Marseille confirme le jugement.
L’Hôpital se pourvoit en cassation devant le Conseil d’Etat qui confirme toutes les décisions des juges du premier degré.
En l’espèce, tous les juges saisis ont considéré qu’à la lecture du jugement du Tribunal correctionnel, il apparaissait que l’agent n’avait eu qu’une implication passive dans un trafic de stupéfiant qu’elle a elle-même dénoncé et a collaboré avec les services de police durant l’enquête.
Les juges administratifs ont également indiqué qu’il ne ressortait d’aucune pièces du dossier que la condamnation et les faits que celle-ci avait pour objet de réprimer, qui n’ont pas fait l’objet d’une publicité particulière, aient eu des conséquences préjudiciables pour le service public, notamment en portant atteinte à la réputation du centre hospitalier de Hyères
Il ressort des pièces du dossier que l’agent s’est toujours acquittée de ses fonctions dans des conditions satisfaisantes.
Il n’est pas établi qu’elle serait susceptible, dans le cadre de ses fonctions, de soustraire des produits pharmaceutiques relevant de la réglementation sur les stupéfiants.
Par ailleurs, aucune disposition législative ou réglementaire n’imposait à l’agent d’informer son employeur de la condamnation pénale dont elle a fait l’objet postérieurement à son recrutement.
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Le Conseil d’Etat vient ainsi préciser que lorsque l’administration apprend que des mentions sont portées au bulletin n° 2 du casier judiciaire d’un agent avec lequel elle a conclu un contrat de recrutement, il lui appartient, pour déterminer si ce contrat est entaché d’irrégularité, d’apprécier si les mentions sont incompatibles avec l’exercice de ces fonctions, eu égard :
1/ à l’objet des mentions en cause et à l’ensemble des motifs de la condamnation pénale dont l’agent a fait l’objet
2/ aux caractéristiques des fonctions qu’il exerce
Ce n’est qu’en caractérisant ces deux éléments que l’Administration peut prendre acte d’une condamnation pénale pour statuer sur un contrat de travail ou aborder une titularisation dans la fonction publique.