L’article 63 de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 a dépénalisé le stationnement irrégulier. Ne pas payer le stationnement ou dépasser l’heure indiquée sur le ticket horodateur ne sera bientôt plus un délit routier.
Est-ce que cela change quelque chose? En réalité…pas du tout. L’Etat, comme la Nature, a horreur du vide, surtout s’il s’agit de faire rentrer de l’argent dans les caisses publiques.
Ainsi, dès le 1er janvier 2016, l’amende pénale sanctionnant le non-paiement ou l’insuffisance de paiement du stationnement sera remplacée par une redevance de stationnement, appelée « forfait de post-stationnement ».
Cette recette non-fiscale sera perçu au profit des Communes ou des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et sera destiné à améliorer les transports en commun ou respectueux de l’environnement.
Par ailleurs, l’ordonnance n° 2015-45 du 23 janvier 2015 a créé une nouvelle juridiction administrative spécialisée : la « commission du contentieux du stationnement payant », qui aura la charge de juger les litiges relatifs au stationnement payant.
L’article L. 2333-87-2 du Code général des collectivités territoriales fixe la compétence de cette juridiction qui statue sur les recours contentieux formés contre les décisions individuelles relatives aux forfaits de post-stationnement.
L’article L. 2333-87-3 du même Code fixe sa composition.
L’article L. 2333-87-4 du même Code détermine les formations de jugement de cette juridiction.
Enfin, l’article L. 2333-87-5 du même Code prévoit que les modalités d’application des quatre précédents articles sont déterminées par décret en Conseil d’Etat.
Une seconde ordonnance, ainsi qu’un décret d’application, qui seront publiés pour le mois d’avril 2015, fixeront les règles de procédure.
Les modalités de nomination de son président sont déterminées par décret en Conseil d’Etat.
Le site de l’AMF, l’association des Maires de France, a récemment décrit de manière très complète le régime du stationnement payant :
La réglementation du stationnement payant.
La notion de stationnement payant désigne différents dispositifs. Schématiquement, le stationnement payant se scinde en deux catégories : il comprend, d’une part, le stationnement en bordure de la voie publique et, d’autre part, les parcs publics de stationnement payants, communément dénommés parkings.
Ces deux modes de stationnement connaissent des régimes juridiques différents dont les contours ne se révèlent pas toujours des plus précis, mais qu’il convient d’appréhender successivement.
1. – Le régime juridique du stationnement payant sur la voie publique
Dès 1969, la légalité du stationnement payant en bordure des voies publiques était admise par la haute juridiction administrative (CE, 26 février 1969, Fédération nationale des clubs automobiles de France). Toutefois, l’institution d’un tel stationnement est subordonnée au respect de certaines conditions et son fonctionnement obéit à des règles qui lui sont propres.
Les conditions d’institution du stationnement payant sur la voie publique
Deux conditions procédurales gouvernent l’institution du stationnement payant sur la voie publique :
– tout d’abord, le conseil municipal doit approuver le principe même de la taxe de stationnement et fixer le taux de celle-ci. En effet, aux termes de l’article L.2331-4, 8° du Code général des collectivités territoriales (ci-après CGCT) « les recettes non fiscales de la section de fonctionnement peuvent comprendre (…) le produit des permis de stationnement et de location sur la voie publique, sur les rivières, ports et quais fluviaux et autres lieux publics ».
– ensuite, et conformément à l’article L.2213-6 du CGCT, « le maire peut, moyennant le paiement de droits fixés par un tarif dûment établi, donner des permis de stationnement ou de dépôt temporaire sur la voie publique, sur les rivières, ports et quais fluviaux et autres lieux publics, sous réserve que cette autorisation n’entraîne aucune gêne pour la circulation, la navigation et la liberté du commerce ». Le maire exerce donc là un pouvoir de police spéciale qui se matérialise par l’adoption d’un arrêté.
Le stationnement payant sur la voie publique doit être motivé par l’amélioration des conditions de circulation. Il ne peut donc être institué que lorsque les arrêtés réglementant la circulation n’ont pas suffi à eux seuls à pallier ces difficultés de circulation.
Outre qu’il doit être rendu nécessaire par les conditions de la circulation, le stationnement payant sur la voie publique n’est légal que lorsqu’il ne porte pas atteinte à la liberté d’accès aux immeubles riverains et à leur desserte (CE, 26 février 1969, Fédération nationale des clubs automobiles de France) et qu’il n’affecte pas le principe d’égalité entre les usagers de la voie publique (CE, 28 février 1996, Association « Le Vésinet sans parcmètre »).
Il convient enfin de noter que, s’agissant du stationnement payant sur voirie, le montant de la taxe a pour seul but d’inciter les automobilistes à stationner le moins longtemps possible. Le conseil municipal dispose donc, théoriquement, d’une grande liberté pour fixer le montant de celle-ci. Toutefois, il est opportun qu’il n’y ait pas de trop grandes différences entre le montant de la taxe du stationnement sur voirie et le montant de la redevance dans les parcs de stationnement lorsque ces derniers existent.
Nature de la gestion du stationnement payant sur la voirie publique
Etroitement lié à l’exercice du pouvoir de police administrative du maire, le stationnement payant sur la voie publique revêt le caractère d’un service public administratif (Cf Service de stationnement payant et délégation de service public par Michel DREIFUSS, AJDA, 20 février 2001, p. 129).
A cet égard, la circulaire du 15 juillet 1982 (JO du 11 septembre 1982) relative au stationnement payant a précisé que « l’institution du stationnement payant sur la voie publique revêt, à titre principal, le caractère d’une mesure de police administrative ».
Ce sont d’ailleurs les liens étroits qui unissent le stationnement payant sur voirie à l’exercice du pouvoir de police qui avaient conduit les auteurs de cette circulaire à réserver une réponse prudente quant à la possibilité de déléguer la gestion de ce service, laissant au juge le soin de décider de la légalité d’une éventuelle délégation de ce service à une entreprise privée.
Or, la jurisprudence administrative, qui avait déjà admis la possibilité d’une délégation du service public du stationnement payant sur la voie publique avant cette circulaire de 1982, a maintenu sa position. En effet, le Conseil d’Etat, dans un arrêt du 1er avril 1994 Commune de Menton a réaffirmé la possibilité pour une commune de déléguer la gestion du stationnement payant sur voirie à une personne privée.
Toutefois, cette dernière ne pourra se voir confier par le contrat de délégation l’exercice d’une mission qui relève de l’exercice du pouvoir de police. Ainsi, dans l’arrêt précité, le Conseil d’Etat a précisé que le service de la police du stationnement, par sa nature, ne saurait être confié qu’à des agents placés sous l’autorité directe du maire et que ceux-ci ne pouvaient être mis à disposition du délégataire par la commune (CE, 1er avril 1994, Commune de Menton c/ Société Scetauparc, Rec. Lebon, p. 176).
En revanche, il est loisible à la collectivité de déléguer au cocontractant privé l’installation des parcmètres, leur entretien, la mise en place de la signalisation, voire la collecte des droits de stationnement versés par les usagers dans les parcmètres qui devront être remis dans leur intégralité au receveur municipal.
Mode de règlement du stationnement payant sur la voie publique
La jurisprudence a assimilé les droits de stationnement à des taxes. Dès lors que l’usager ne s’acquitte pas du montant de la taxe, il viole les règles posées par l’arrêté municipal régissant le stationnement et peut donc se voir dresser un procès verbal par un agent de police municipale.
Il convient toutefois de souligner que la jurisprudence administrative prohibe les arrêtés municipaux instituant des amendes pénales en cas de dépassement de la durée horaire pour laquelle l’automobiliste a payé. Seule une amende correspondant à la première classe de contraventions peut être dressée à l’encontre des contrevenants (CAA de Bordeaux, 16 novembre 1998, Commune de Marmande).
2. – Le régime juridique du stationnement payant hors voirie (parcs de stationnement)
Aux termes de la circulaire du 15 juillet 1982, le stationnement payant hors voirie désigne les emplacements de stationnement situés hors de la voie publique soit par aménagement de surface soit par construction en souterrain ou en élévation.
Les conditions d’institution d’un stationnement payant hors voirie
C’est au conseil municipal qu’il revient de décider de la création d’un service public du stationnement payant hors voirie. Ce service peut donc être exploité en régie ou selon un mode de gestion déléguée (concession, affermage).
Et si les parcs publics de stationnement hors voirie constituent un service public industriel et commercial, il n’en demeure pas moins que leur existence doit être justifiée par les nécessités de circulation dans l’agglomération.
Cette condition de fond étant observée il appartiendra à la collectivité de se conformer aux règles de publicité de la loi du 23 janvier 1993, dite loi Sapin, si elle souhaite déléguer la gestion de ce service.
Nature de la gestion du stationnement payant hors voirie
La nature du stationnement payant hors voirie a été appréhendée en 1975 par le Tribunal des Conflits qui a précisé qu’il s’agissait là d’un service public industriel et commercial (Tribunal des conflits, 17 novembre 1975, Sieur Gamba, Rec. Lebon, p 801).
Si cette catégorie de services peut être exploitée en régie, ces derniers font le plus souvent l’objet d’une délégation de service public à l’instar de la gestion du stationnement payant sur la voie publique.
Toutefois, l’analogie entre les deux modalités du stationnement payant ne peut être poursuivie plus loin s’agissant du paiement du droit de stationnement.
Mode de règlement des droits de stationnement hors voirie
En effet, dans le cas du stationnement paiement hors voirie, il ne s’agit pas d’une taxe dont l’existence et le taux n’ont d’autre fonction que d’inciter les automobilistes à stationner le moins longtemps possible mais plutôt d’un prix ou d’une redevance pour service rendu dont le montant ne saurait excéder le prix de revient du service (CE, 2 avril 1997, Commune de Montgeron, CJEG, 1998, p 433).
Le prix perçu sur les usagers étant la contrepartie du stationnement et de la garde de leur véhicule, il ne saurait être différent selon que l’usager du service réside ou ne réside pas dans la commune (CE, 12 juillet 1995, Commune de Maintenon, Rec. Lebon, p 305).
Les montants tarifaires que doivent verser les usagers sont fixés, ou du moins encadrés, par le conseil municipal et ce, que le service public du stationnement payant soit géré en régie ou par le biais d’une délégation. Dans ce dernier cas, les conditions de fixation des montants tarifaires sont, le plus souvent, déterminées au sein du contrat de délégation.
Aux termes de la circulaire du 15 juillet 1982, les parcs de stationnement ne sont pas assimilés à la voirie publique et ne peuvent donc se voir appliquer les dispositions de l’article L.2213-6 du CGCT. Le paiement acquitté par les usagers de ces parcs souterrains correspondent à des redevances dont les difficultés de recouvrement ne peuvent être réglées par l’adoption d’un arrêté municipal dont la violation pourrait donner lieu à la rédaction d’un procès verbal d’infraction par des agents de police (et à compter du 1er janvier 2016, par un procès-verbal de constatation dont la cotestation relèvera de la « commission du contentieux du stationnement payant »).
Le recouvrement des sommes impayées doit être poursuivi selon les règles de droit privé dont l’application incombe en dernier ressort aux juridictions judiciaires compétentes pour les difficultés qui surgissent entre le gestionnaire d’un service public industriel et commercial, qu’il s’agisse d’une personne publique ou privée, et ses usagers (TC, 22 janvier 1921, Société commerciale de l’Ouest africain).